Brèves de traite – février 2023

MAMMITES : profils de comptage cellulaire somatique en élevage laitier

Dans cette étude, les auteurs ont constaté que près de 5% des vaches présentaient un profil de comptage cellulaire somatique (CCS) régulièrement fluctuant, phénomène nouvellement décrit en conditions de traite automatisée, de nature très stable et présentant un schéma répété d’augmentation et de diminution substantielles du CCS sur environ 4 jours. Le mécanisme à l’origine de cette fluctuation cyclique n’est pas clair, malgré le fait que cela a été observé chez une proportion élevée des vaches. L’objectif de cette étude menée aux Pays-Bas était de caractériser des fluctuations de CCS, en termes de prévalence, cyclicité et facteurs associés. Les auteurs ont analysé, sur des périodes d’un mois, des données provenant de 1.000 vaches, issues de 55 élevages répartis dans 6 pays, tous en traite robotisée. Le phénomène de CCS régulièrement fluctuant a été observé chez 4,7% des vaches ; les épisodes, d’une durée médiane de 4 jours, avaient des valeurs médianes de CCS de 701.000 cellules/ml, avec une amplitude médiane de 552.000 cellules/ml. Aucune association significative n’a été mise en évidence entre le profil de ces épisodes de CCS fluctuante et la nature des espèces bactériennes isolées dans le lait par culture. (Deng et al, Journal of Dairy Science 2020, 104 : 20063 ; https://doi.org/10.3168/jds.2020-20063).

DIAGNOSTIC : imagerie 3D et suivi de la croissance des vaches laitières

La présente étude a démontré le potentiel de l’imagerie 3D en tant qu’outil rapide et peu coûteux permettant de surveiller la croissance des vaches laitières dans les élevages laitiers. Cette étude menée conjointement par l’Idele et l’INRAE de Saint-Gilles a utilisé une technologie d’imagerie 3D pour estimer le poids vif de 16 vaches laitières Holstein (8 en 1ère lactation, 4 en 2ème lactation, 4 en 3ème lactation et plus). Les données de croissance corporelle étaient complétées par les valeurs de remplissage du tube digestif (via l’ingéré en MS alimentaire) et de réserves corporelles (via la note d’état corporel). Les variations de poids corporel au cours de la lactation étaient principalement dues à des modifications de croissance, qui représentaient environ les deux tiers du gain de poids corporel, quelle que soit la parité. Les réserves corporelles et le remplissage intestinal ont eu des effets plus faibles mais toujours notables sur la composition corporelle, avec un gain plus élevé de réserves corporelles et de remplissage intestinal pour les vaches en première lactation par rapport aux vaches multipares. Cette étude a également confirmé qu’il est possible d’estimer le poids corporel à partir du volume, avec une erreur de 25,4 kg en moyenne. (Xavier et al, Journal of Dairy Science 2021, 105 : 21337 ; https://doi.org/10.3168/jds.2021-21337).

NUTRITION : restriction alimentaire de précision et efficience alimentaire

La restriction alimentaire de précision diminue les écarts d’efficience alimentaire entre les vaches et réduit leurs émissions de méthane sans dégrader leurs niveaux de production. L’objectif de l’étude menée par l’INRAE de Saint-Gilles était de tester une restriction alimentaire de précision (RAP) comme un levier d’amélioration de l’efficience alimentaire de vaches laitières en lactation. Une période de référence, correspondant en moyenne aux 6 premiers mois de lactation, pendant laquelle 68 vaches laitières ont reçu une ration complète a permis de classer les vaches suivant leur efficience alimentaire. Les 15 vaches les moins efficientes (effi-) et les 15 vaches les plus efficientes (effi+) ont subi une restriction alimentaire pour leur offrir la quantité d’aliments qu’elles auraient consommée si elles avaient été parmi les 10% les plus efficientes. La RAP a diminué en moyenne la consommation de MS des vaches effi- de 2,6 kg MS/j alors que cette diminution n’a été que de 0,8 kg/j pour les vaches effi+. Les émissions journalières de CH4 ont logiquement chuté de 49 g/j pour les vaches effi- et de 27 g/j pour les vaches effi+. Cette RAP a resserré les différences entre vaches en termes d’efficience alimentaire, comme le démontre la baisse des écart-types de la MS ingérée, de 0,87 à 0,69 kg MS/j, jusqu’à ne plus avoir de différences significatives d’efficiences entre les effi+ et effi- à l’issue de la RAP. La RAP n’a pas eu d’effet significatif sur la production laitière, le poids vif et les variations de poids vif. (Fischer et al, Journal of Dairy Science, 2020, 103 : 5, 4408-4422).).

ANTIBIORESISTANCE : SNARM chez les vaches, jeunes bovins et dans l’environnement

Des souches de Staphylocoques « non-aureus » résistantes à la méticilline (SNARM) ont été isolées dans tous les élevages allemands sélectionnés au départ pour la présence de SARM (Staphylococcus aureus résistants à la méticilline). C’est une des conclusions de l’étude publiée par des scientifiques berlinois dans 20 élevages laitiers allemands. Le taux de tests positifs aux SNARM était de 3,3 % dans les prélèvements de lait de quartier, de 42,1 % dans le lait de tank à lait de 29,1 % dans les écouvillons nasaux de veaux nourris au lait, de 18,3 % chez les veaux en post-sevrage et 7,3 % dans les écouvillons nasaux de génisses laitières. Dans l’environnement, des SNARM ont été détectés dans des échantillons de poussière sur 25 % des élevages laitiers ainsi que dans des manchons trayeurs et des ventouses de nourrisseurs automatiques pour veaux. Un ou plusieurs échantillons ont donc été trouvés positif(s) dans un ou plusieurs sites de prélèvements des 20 élevages présélectionnés. La moyenne géométrique du nombre de cellules somatiques dans les prélèvements de lait de quartier affectés par les SNARM (183 000 cellules/ml) était légèrement supérieure à celle de tous les laits de quartier (114 000 cellules/ml). Neuf espèces de SNARM ont été identifiées ; S. sciuri, S. lentus, S. fleurettii, S. epidermidis et S. haemolyticus étaient les espèces les plus communes. Dans certaines fermes, des éléments génétiques mobiles similaires ont été détectés dans les SARM et SNARM. Il a été suggéré que les gènes de résistance pourraient être transférés entre Staphylocoques « non-aureus » et S. aureus dans ces élevages. (Schnitt et al, Journal of Dairy Science, 2020, 104 : 19704 ; https://doi.org/10.3168/jds.2020-19704).

LOCOMOTION : impact économique des troubles locomoteurs de la vache laitière

La perte économique annuelle totale due aux troubles locomoteurs (mobilité « suboptimale » pour les auteurs) pour une exploitation laitière hollandaise moyenne de 125 vaches était estimée à 15.342 €, soit 122 € par vache et par an. Les pertes économiques directes totales étaient de 9.061 €, dont 47 % étaient dues à des vaches présentant des boiteries légères. Les pertes économiques indirectes étaient principalement dues à la diminution de la production laitière et à l’augmentation des coûts de réforme. L’objectif de cette étude collaborative entre Néerlandais et Danois était de simulerla dynamique de 8 types de troubles locomoteurs et d’estimer les pertes économiques induites pour un troupeau laitier de 125 vaches. La notation des boiteries s’échelonnait de 1 (mobilité parfaite) à 5 (mobilité sévèrement affectée).  Les résultats de la simulation ont été les suivants pour les troubles locomoteurs (note ≥ 2) : une prévalence moyenne annuelle de 57% ; une durée médiane des épisodes de 80 jours ; peu de différences sur l’incidence cumulée pour 100 vaches entre les périodes de pâturage et de bâtiment (sauf pour la dermatite interdigitée et la maladie de la ligne blanche) ; un allongement de 6 jours en moyenne de l’intervalle entre vêlage et 1ère IA ; une augmentation des vaches réformées (19 versus 2 pour ce troupeau laitier moyen de 125 vaches). (Edwardes et al, Preventive Veterinary Medicine, 2022 ; 199 : 105551 ; https://doi.org/10.1016/j.prevetmed.2021.105551).

IMMUNITE : thermisation du colostrum et conséquences sur l’immunité

Le traitement thermique du colostrum (<60°C) a diminué les teneurs en IgG du colostrum de 5,38 g/l et augmenté les taux d’IgG sériques de 2,65 g/l et de protéines totales sériques de 0,21 g/dl, en comparaison du colostrum frais ou congelé. C’est la conclusion d’une méta-analyse menée sous l’égide de l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, avec une sélection de 21 études publiées, en séparant les conditions du traitement thermique du colostrum (seuil de 60°C). Une thermisation modérée entraine en effet une diminution des pathogènes contenus dans le colostrum, ce qui favorise une meilleure absorption des IgG au niveau de l’intestin du veau. Au contraire, un chauffage thermique au-delà de 60°C induit la destruction ou la dénaturation des IgG. Il faut noter une hétérogénéité modérée des valeurs d’IgG dans le colostrum pour la thermisation modérée. Il conviendrait de compléter ces données par un suivi d’autres éléments de la réponse immunitaire (cytokines et cellules de l’immunité). (Malik et al, Journal of Dairy Science, 2021, 105: 21231 ;https://doi.org/10.3168/jds.2021-21231).

PRODUCTION : facteurs influençant la longévité des vaches laitières

Les facteurs suivants influencent significativement la longévité de vaches laitières de race Holstein : le statut par rapport à l’IA (nombre d’IA, fécondation ou non, …), la facilité de vêlage (assistance ou non), le nombre d’épisodes de mammite clinique, le nombre de jours avec une concentration élevée en cellules somatiques (CCS) du lait, le déplacement de caillette (absence ou présence) et la conformation de la mamelle.  Le but de l’étude (collaboration des équipes INRAE/Idele/Allice) était d’étudier l’influence de la production, de la reproduction, de la morphologie et des caractères de santé sur la longévité des vaches laitières, afin d’identifier les facteurs de risque de la réforme. Les données comprenaient 278.217 lactations provenant de 122.461 vaches Holstein élevées dans 640 troupeaux laitiers. Les auteurs ont séparé la longévité « vraie » (aptitude de la vache à retarder la réforme) et la longévité fonctionnelle (aptitude de la vache à éviter une réforme involontaire). Les différences dans les estimations du risque relatif (RR) entre les 2 types de longévité ont montré que le niveau de production laitière influençait souvent les décisions de réforme : les éleveurs sont plus enclins à réformer des vaches à faible production, même lorsqu’elles ont de bonnes autres caractéristiques. (Rostellato et al, Journal of Dairy Science, 2020, 104: 19974 ; https://doi.org/10.3168/jds.2020-19974).

VEAU LAITIER : prévalence et prédiction de la bactériémie chez les veaux diarrhéiques

La prévalence de la bactériémie chez les veaux diarrhéiques présentant des signes généraux (dépression ou déshydratation) était significativement inférieure aux données précédemment publiées ; la bactériémie était rare chez les veaux sans état dépressif ou asthénique. Ce sont les conclusions de cette étude nord-américaine (Universités de l’Ohio et du Missouri) sur la base du suivi de 21 veaux femelles de race laitière de moins de 21 jours d’âge, diarrhéiques ou non, sur une période de 3 semaines. La prévalence de la bactériémie chez les génisses laitières de renouvellement souffrant de diarrhée accompagnée de signes généraux de l’infection était de 9,26 %, ce qui est significativement inférieur aux estimations rapportées lors de précédentes études (en moyenne autour de 1 veau sur 3 atteint de diarrhée). Des signes cliniques généraux, notamment la fièvre (> 39,7°C) et un état dépressif, ainsi que l’âge (< 12 jours) ont été significativement associés à une bactériémie chez les génisses laitières diarrhéiques. La bactériémie était rare chez les veaux sans signes de dépression ; par conséquent, la thérapie antimicrobienne ciblant une bactériémie potentielle n’est actuellement pas justifiée dans les cas habituels de diarrhée chez les veaux en pré-sevrage sans signes généraux de dépression. (Garcia et al, 2020, Journal of Dairy Science, 105 : 807-817).

TARISSEMENT : CMT ou CCS sur les vaches au tarissement et traitement antibiotique

La sélection des quartiers pour le traitement antimicrobien en fin de lactation basée sur le CMT (« California Mastitis Test ») a été associé à un plus fort taux de guérison bactériologique, un risque réduit de toute nouvelle infection intramammaire et une réduction de la prévalence de toute infection après vêlage, par rapport à une sélection de vaches basée sur les valeurs de concentration en cellules somatiques (CCS). Cependant, la sélection basée sur le CMT a entraîné une utilisation plus élevée d’antimicrobiens au tarissement par rapport à la sélection basée sur la CCS. Cette étude néozélandaise a comparé l’affectation de vaches ou de quartiers soit à un traitement antimicrobien à la fin de la lactation sur la base du CCS des vaches (c’est-à-dire que tous les quartiers des vaches ayant un CCS maximal > 200 000 cellules/ml au cours de la lactation ont reçu un traitement antimicrobien) ou bien une affectation à un traitement au niveau du quartier basé sur un score de CMT effectué immédiatement avant le tarissement. Pour les 2 groupes, les vaches recevaient un obturateur à la suite du traitement antimicrobien. Les différences entre groupes CMT et CCS ont été les suivantes : 95 versus 90% pour le pourcentage de guérison bactériologique ; 3,2 versus 4,4% en ce qui concerne le taux de nouvelles infections (absence d’infection au tarissement mais infection après vêlage ou bactéries différentes entre celle isolée au tarissement et celle diagnostiquée après vêlage ou quartier traité pour mammite clinique entre le tarissement et 30 jours de lactation) ; 3,7 versus 5,4% pour les infections intramammaires post-partum (comprenant les infections existantes et nouvelles)  ; une augmentation de 63% de la quantité globale d’antimicrobiens au tarissement.  (Mc Dougall et al, Journal of Dairy Science, 2021, 105: 2453-2472).

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