Moins de 50% des vaches laitières fortes productrices en chaleurs entre 50 et 80 jours postpartum

L’intervalle entre le vêlage et la 1ère IA a considérablement augmenté chez la vache Holstein au cours des 10 dernières années.

L’allongement de l’inactivité ovarienne post partum (anoestrus vrai, c’est-à-dire absence réelle de reprise de cyclicité) n’est pas le seul facteur animal expliquant l’augmentation du délai de mise à la reproduction. En effet, la reprise d’activité sexuelle peut s’accompagner d’irrégularité des cycles dont la proportion s’accroît (15 à 30% des VLHP concernées) ; c’est le cas des interruptions de cyclicité (liées par exemple à un kyste folliculaire) et des phases lutéales prolongées (corps jaune persistant). Ces profils anormaux se caractérisent, tout comme l’anoestrus, par l’absence d’expression de chaleurs ; ils rendent donc impossible l’insémination des femelles concernées.

Et même quand les femelles ovulent, et donc devraient présenter un comportement de chaleurs, la partie n’est pas gagnée …

Une étude a été menée en 2003 à l’ENSA de Rennes afin d’actualiser les données sur la cyclicité des VLHP et leur comportement de chaleurs. Dans cet objectif, 64 vaches Prim’Holstein ont fait l’objet d’un suivi systématique de l’ovulation (par dosage de la progestérone dans le lait) et d’une observation continue de leur comportement de chaleurs (enregistrements vidéo par 6 caméras, permettant de s’affranchir du facteur humain).

Entre 50 et 80 jours post partum, seules 44 de ces vaches (69%) ont ovulé, avec pour 6 d’entre elles aucune modification comportementale (« chaleurs silencieuses »).
Le signe caractéristique d’acceptation du chevauchement n’a été observé que sur 26 des 44 vaches ayant ovulé (59%), soit sur 41% de l’ensemble des 64 vaches suivies.
En l’absence du signe spécifique des chaleurs, les comportements les plus fréquents ont été la pose ou le frottage du menton sur la croupe ainsi que le reniflage ou le léchage de la vulve (qu’ils soient initiés ou reçus par la vache en chaleur).

Comportement de chaleurs de 64 vaches fortes productrices suivies 24h/24h entre 50 et 80 jours post partum (KERBRAT S. & DISENHAUS C. 2004)

Ainsi, l’augmentation de la taille des exploitations et la réduction du temps consacré par les éleveurs à observer les animaux ne sont pas les seules raisons expliquant l’allongement du délai de mise à la reproduction après le vêlage.
A côté des facteurs structurels et humains, les VLHP sont aussi largement responsables de la difficulté croissante à détecter les chaleurs :
– elles recouvrent une activité cyclique plus tardivement (l’anoestrus vrai augmente)
– elles présentent davantage d’anomalies de la reprise de cyclicité (avec absence de comportement de chaleurs)
– les chaleurs sont plus discrètes, plus courtes ; dans certains cas, le comportement d’acceptation du chevauchement n’est plus observé.

La difficulté croissante à observer les chaleurs imposera-t-elle l’utilisation dans les années à venir d’une échelle de notation telle que celle développée dès 1996 aux Pays-Bas par van EERDENBURG et al ? A chaque manifestation d’un signe d’oestrus, même secondaire, est affecté un nombre de points. La décision d’inséminer la femelle est prise quand un nombre fixé de points est atteint (même en l’absence d’observation de l’acceptation du chevauchement). Ce système de pointage, assez contraignant, est efficace mais ne règle pas le problème posé par les vaches sans aucun signe détectable de chaleurs (14% des ovulations sont « silencieuses »).

Référence :KERBART S. & DISENHAUS C. Le Médecin Vétérinaire du Québec 2004. 34 (1-2) : 144 (Recueil du Congrès WBC 2004). DISENHAUS C. et al. Journée Bovine nantaise 2003. 94-101. GRIMARD B. & DISENHAUS C. Le Point Vétérinaire. N° spécial Reproduction des Ruminants 2005. 16-21. PONSART C. & HUMBLOT P. Journées de la Société Française de Buiatrie 2002. 4-13. Van EERDENBURG F. J. et al. Veterinary Quaterly 1996. 18 : 52-64.

GP/FR/ORUM/1216/0123