Brèves de traite – avril 2021

 ENVIRONNEMENT : stratégie alimentaire de réduction de l’émission de méthane

L’émission de méthane par les ruminants, à l’origine des gaz à effet de serre (GES) peut être modulée par une stratégie alimentaire, notamment grâce à l’utilisation de tannins d’origine végétale, sans effets défavorables sur les performances de production. Les auteurs américains de cette publication ont réalisé une revue bibliographique des méthodes permettant de réduire les émissions de méthane chez les ruminants. Pour atteindre cet objectif, il convient d’agir sur le microbiote ruminal notamment, par la sélection génétique et le régime alimentaire. La publication s’est particulièrement intéressée à l’effet anti-méthanogène des tannins issus de plantes : les tannins condensés (ou pro-anthocyanidines) qui sont des polyphénols présents en général dans les légumineuses ; les tannins hydrolysables (acide gallique ou ellagique), moins intéressants car ayant un caractère toxique à dose modérée à forte. La plupart des données concernant l’impact de fourrages enrichis en tannins condensés, sans impact négatif sur la productivité, concernent des rations à taux protéique élevé, notamment avec des taux de protéines brutes de 15 à 25 % provenant de diverses plantes : trèfle en patte d’oiseau, lotier des marais, Lespedeza de Chine, sulla et ray-grass anglais ; des études in vitro montrent que le recours à ces fourrages enrichis peut réduire l’émission de méthane de 25 à 51 %. Cette réduction peut être renforcée par l’addition d’extraits de quebracho et de yucca (saponines). De plus, ces régimes enrichis en tannins influent, chez les vaches laitières notamment, sur le niveau d’infestation par des nématodes gastro-intestinaux et augmentent la teneur en acides gras insaturés du lait. (Min et al, Animal Nutrition, 2020, 6, 231-246).

  REPRODUCTION : flore bactérienne utérine et métrites chez la vache laitière

La diversité de la flore bactérienne utérine diminue en période post-partum chez la vache saine ; elle est également plus faible chez la vache atteinte de métrite en comparaison de la vache saine. Cette équipe scientifique chinoise a sélectionné, au sein d’un gros troupeau laitier, 60 vaches laitières, parmi lesquelles ont été retenues des vaches saines et des vaches atteintes de métritedont les contenus utérins ont été prélevés 1, 7, 14, 21, 35 jours après vêlage. La communauté bactérienne utérine a été déterminée et séquencée sur la base d’une technologie d’amplification (PCR) de l’ADN 16S. Le nombre d’OTU (Unité Taxonomique Opérationnelle, qui permet de regrouper des individus phylogénétiquement proches) a été respectivement supérieur et inférieur à 200 chez les vaches saines et infectées. Par rapport aux vaches témoins, les femelles à métrites avaient une flore moins diversifiée avec notamment une augmentation des Bacteroidetes, Fusobacteria, Porphyromonas, Bacteroides, une diminution des Firmicutes, Proteobacteria et Clostridium. (Chen et al, Veterinary and Animal Science, 2020, 10 : 100102).

 ANTIBIORESISTANCE : exposition de la flore digestive du veau aux antibiotiques et antibiorésistance des colibacilles commensaux

Cette étude de terrain souligne l’impact de l’alimentation de veaux laitiers avec du lait provenant de vaches traitées aux antimicrobiens ainsi que celui du traitement antibiotique des veaux laitiers sur l’antibiorésistance des colibacilles commensaux de leur flore digestive. Ce sont les principales conclusions d’une étude réalisée en 2017 dans 100 élevages laitiers par l’Anses de Lyon en partenariat avec la SNGTV et Labéo-Manche. Un suivi longitudinal de veaux laitiers a été mené jusque 2 semaines (mâles) ou 7 semaines d’âge (femelles) avec écouvillonnage rectal à ces âges précédemment évoqués, puis analyses de la sensibilité de la flore digestive et des colibacilles commensaux, détermination du phénotype BLSE (β-lactamases à spectre étendu). Les niveaux de résistance de la flore dominante étaient élevés (> 60 %) pour streptomycine, tétracycline et amoxicilline, faibles (< 3 %) pour les antibiotiques d’importance critique (céphalosporines de dernières générations, fluoroquinolones). Chez les veaux femelles, la résistance antimicrobienne a diminué entre 2 et 7 semaines d’âge. La consommation de lait de vaches traitées aux antimicrobiens a été associée avec une résistance accrue aux antibiotiques précédemment cités ainsi qu’à l’association triméthoprime-sulfonamide. Par contre, aucune corrélation n’a été mise en évidence entre antibiorésistance de la flore dominante et des colibacilles et consommation par le veau de colostrum issu de vaches traitées au tarissement. (Jarrige et al, Preventive Veterinary Medicine, 2020, 185 : 105177).

 TRAITE : installation de robots de traite et performances de reproduction

Le passage de la traite conventionnelle au robot de traite en élevage laitier a permis d’améliorer les performances de reproduction de vaches Holstein en première et deuxième lactations, exception faite de l’intervalle vêlage-IA fécondante sur la deuxième lactation. L’objectif de cette étude polonaise était de comparer production laitière standard (305 jours) et performances de reproduction dans des élevages qui étaient passés d’un système de traite conventionnelle à une traite robotisée entre 2010 et 2013. L’étude a intégré 16 élevages laitiers pour 2.620 vaches Holstein, avec relevé de critères de production laitière et reproduction (2 premières lactations), soumis par la suite à une analyse statistique afin de mettre en évidence d’éventuelles différences significatives entre les 2 systèmes. Suite au passage en robot de traite, la production laitière a été améliorée respectivement de 1.078 et 1.182 kg pour les première et deuxième lactations. En termes de fertilité, la transition vers une traite robotisée a permis d’améliorer significativement l’intervalle entre la première IA et l’IA fécondante (15 versus 22 jours) et le nombre d’IA nécessaires à la fécondation (1,79 versus 2,01) pour le premier cycle de reproduction, l’âge au vêlage (1.226 versus 1.244 jours) pour la seconde lactation. Une interaction significative a été démontrée sur les critères de fertilité entre système de traite et élevage. (Piwczynski et al, Livestock Science, 2020, 240, 104140).

 GENISSE : facteurs associés à mortalité et croissance des génisses laitières

La conduite d’élevage (distribution du colostrum, alimentation, logement, manipulation des animaux) a un impact fort sur la croissance et la survie des futures génisses laitières.  Une étude transversale a été menée dans le Nord de l’Allemagne entre 2012 et 2014 afin d’identifier des facteurs de risques d’une mauvaise croissance (3 premiers mois) et d’une mortalité élevée (6 premiers mois) de veaux laitiers femelles, sur la base de données issues de visites d’élevages et de questionnaires sur la conduite des fermes. Les facteurs significativement associés à une mortalité élevée (> 5 %) ont été la proportion de veaux avec une déficience du transfert d’immunité passive (> 25 %), l’utilisation métaphylactique de lactate d’halofuginone. Pour ce dernier point qui semble surprenant, l’explication tient au fait que les élevages ayant la plus forte incidence de diarrhées néonatales traitent plus systématiquement que les élevages à moindre incidence de troubles digestifs avec cette molécule active notamment contre les cryptosporidies. Une trop faible quantité de concentrés consommée autour du sevrage, le changement de lot des veaux plus de deux fois jusqu’au sevrage et un risque diminué de l’incidence des fièvres de lait chez les mères (<5% ; résultat surprenant mais sans doute lié à un biais dû à un effet « parité », car il y avait plus de vaches à plus de 3 lactations dans les élevages à forte incidence de fièvre vitulaire) ont été significativement associées à une mauvaise croissance des futures génisses (médiane: 675 grammes par jour de la naissance au sevrage). (Tautenhahn et al, Preventive Veterinary Medicine, 2020, 184, 105154).

  NUTRITION : vitamine E et paramètres de production, santé et reproduction

Une supplémentation de la ration des vaches laitières en vitamine E n’influe ni sur la qualité du colostrum et le comptage en cellules somatiques du lait, ni sur la production laitière, mais améliore certains critères de reproduction (taux de rétention placentaire, Intervalle Vêlage-IA fécondante), ces effets positifs étant corrélés aux teneurs du sérum en vitamine E et modulés par une supplémentation en sélénium. Ce sont les conclusions d’une méta-analyse réalisée par des scientifiques iraniens et autrichiens visant à évaluer l’influence d’une supplémentation en vitamine E sur différents critères immunitaires, zootechniques et reproducteurs. La base de données étudiée a englobé 36 publications correspondant à 53 essais de supplémentation en vitamine E. L’impact d’un enrichissement de la ration en cette vitamine n’a pas eu d’influence sur le niveau de production laitière, la concentration en cellules somatiques du lait, la teneur du colostrum en Ig G. En revanche, une supplémentation en vitamine E réduisait en moyenne de 6 % le taux de rétention placentaire avec un effet « race » (moins bonne réponse des vaches Holstein par rapport aux autres races). Les intervalles vêlage-1er œstrus et vêlage-IA fécondante, le nombre d’IA pour une fécondation réussie étaient également améliorés avec un effet de réponse corrélé à la dose administrée. (Moghimi-Kandelouzi et al, Journal of Dairy Science, 2020, 103 : 7, 6157-6166).

 TRAITEMENT : effet des AINS sur l’épithélium mammaire lors d’inflammation

Plusieurs molécules AINS usuelles n’empêchent pas l’atteinte de la barrière épithéliale mammaire lors d’inflammation déclenchée par des lipopolysaccharides bactériens, mais contribuent significativement à la restauration rapide de l’intégrité de cette barrière : c’est la conclusion d’une étude réalisée in vitro par des physiologistes de l’Université de Berne (Suisse). Ces auteurs ont soumis des cultures de cellules épithéliales mammaires de vache à une inflammation provoquée par des lipopolysaccharides d’origine colibacillaire, ceci en présence ou non de concentrations actives (étudiées pour simuler les posologies AMM de ces molécules) de différents AINS (dont la flunixine méglumine, le méloxicam et le kétoprofène). L’atteinte de l’intégrité et de la viabilité des cellules épithéliales n’est pas modifiée dans un premier temps par l’addition des molécules anti-inflammatoires en présence des polysaccharides bactériens (avec même un effet amplificateur d’irritation tissulaire lors de surdosage de ces molécules) ; par contre, le retour à l’intégrité de la barrière épithéliale mammaire est rapide (maximum de 24 heures) grâce à l’action « régénératrice » de ces différents AINS. Il est probable que, dans le cadre d’un traitement des mammites en élevage, cet effet de « récupération » de l’intégrité du tissu épithélial mammaire favorise un retour à une composition « normale » du lait. (Sintes et al, Journal of Dairy Science, 2020, 103 : 11, 10742-10753).

GP-FR-NON-210400008