Brèves de traite – Décembre 2019

NUTRITION : ingéré alimentaire pré- et post-partum et pathologies postpartum

La mesure de l’ingéré de matière sèche en période pré-partum constitue un bon prédicteur des pathologies post-partum (cétose, mammite clinique). L’objectif de cette étude américaine était double : évaluer la relation entre nutrition (ingéré de matière sèche et équilibre énergétique de la ration en périodes pré- et post-partum) et santé (épisodes de cétose et mammite clinique après vêlage) ; observer si ces 2 composantes nutritionnelles (avant vêlage) étaient de bons prédicteurs des 2 pathologies post-partum explorées. Un total de 476 vaches a été analysé dans le cadre de cette étude. Les vaches ayant déclaré une mammite clinique se sont caractérisées par un ingéré de matière sèche (en pourcentage du poids corporel) significativement plus faible en période pré-partum (1,56 vs 1,65 %), avec une « balance » énergétique légèrement inférieure (effet non significatif) par rapport aux vaches saines. Les critères d’ingéré de matière sèche (% du poids corporel) et d’équilibre énergétique de la ration dans les 3 jours avant vêlage semblent être de bons prédicteurs d’épisodes de mammite clinique post-partum. Ces mêmes tendances ont été observées pour la cétose, avec un risque supplémentaire en cas d’équilibre énergétique insuffisant de la ration. (Perez-Baez et al, Journal of Dairy Science, July 2019, in press).

DIAGNOSTIC : prédiction des mammites au tarissement par comptage cellulaire quotidien

Le comptage quotidien des cellules somatiques dans le lait est un moyen fiable de détecter des vaches laitières saines bactériologiquement au tarissement et peut ainsi permettre de mettre en place plus aisément une stratégie de traitement sélectif des vaches taries en élevage laitier : des spécialistes de la faculté vétérinaire de Gand ont suivi 550 vaches laitières provenant de 15 élevages laitiers commerciaux sur une période de 6 mois. L’objectif était de déterminer à l’échelle individuelle de la vache les performances et la valeur prédictive d’un comptage en cellules somatiques (CCS) quotidien au cours des 5 jours précédant le tarissement, afin d’identifier les vaches infectées par un agent pathogène majeur de mammites. En parallèle au relevé des CCS, une culture bactériologique était réalisée à l’échelle du quartier pour chaque vache, examen considéré comme méthode de référence. En considérant le seuil de 200.000 cellules/ml pour la moyenne géométrique du CCS sur les 3 derniers jours de test, les sensibilité et spécificité globales du suivi des CCS avant tarissement ont été respectivement évaluées à 37,6 et 79,3 % (avec une sensibilité supérieure mais une spécificité plus faible pour les multipares en comparaison avec les primipares). (Lipkens et al, Journal of Dairy Science, 2019, 102, 4309-4321).

BIEN-ÊTRE : relation entre bien-être et rentabilité en élevage laitier 

Une amélioration du confort et du bien-être des vaches dans les élevages laitiers en stabulation libre est associée à une productivité accrue du troupeau et une meilleure rentabilité (marge sur coût de renouvellement) : l’objectif de cette étude canadienne était d’évaluer les associations entre les mesures de la productivité du troupeau, la rentabilité de l’élevage et les indicateurs de bien-être et confort. Au total 130 élevages laitiers ont été suivis dans les provinces de l’Alberta, de l’Ontario et au Québec, dont 20 utilisaient un robot de traite. L’augmentation annuelle de production de lait (corrigée à 4 % de matières grasses et 3,3 % de protéines) a été significativement associée à une prévalence réduite de vaches présentant des lésions du genou, des flancs sales et des boiteries. La marge économique des exploitations par vache a été significativement corrélée à la durée du temps de couchage moyen, au pourcentage de logettes avec litière sèche et à la moindre prévalence des vaches avec des lésions du genou.En pratique pour les producteurs de lait, les avantages économiques, associés à un accroissement du bien-être animal, proviennent certainement soit d’un prix du lait amélioré (qualité « premium »), soit d’une augmentation de la productivité.(Villetaz Robichaud et al, Journal of Dairy Science, 2018, 102, 4341-4351).

MAMMITES : mammites à Streptococcus agalactiae et production laitière

Une infection mammaire à Streptococcus agalactiae impacte significativement la production laitière (sur une période de 2 à 3 mois après le diagnostic) et le comptage en cellules somatiques (CCS : pic atteint 1 mois avant la mise en évidence de la positivité) : l’objectif de la présente étude était d’estimer les effets d’une mammite à Streptococcus agalactiae sur le niveau de production laitière et le CCS dans les élevages laitiers norvégiens. Les élevages dans lesquels Streptococcus agalactiae a été détecté individuellement sur des vaches (culture bactériologique ou PCR) entre 2012 et 2015 ont été inclus dans l’étude. Ont été relevés tous les mois, sur cette longue période, les niveaux de production laitière et les CCS, en comparant vaches infectées et saines pour chaque élevage. La diminution de production laitière des vaches infectées, par rapport aux vaches non infectées, a été respectivement de 0,13 et 1,24 kg par vache et par jour, respectivement au moment du diagnostic de l’infection et 2 à 3 mois après ce diagnostic. Ces pertes quantitatives en lait ont persisté jusqu’à la fin de la période d’enregistrement. L’impact de l’infection sur le CCS (essentiellement sur le niveau du pic) dépendait des isolats de streptocoques (typés par séquençage). (Holmoy et al, Journal of Dairy Science, 2019, 102, 8385-8399).

 ELEVAGE BIO : santé de la mamelle dans les élevages bio

La santé mammaire dans les élevages laitiers conduits en agriculture biologique (bio) est comparable à celle des élevages conventionnels, voire a tendance à être moins bonne, en fonction de paramètres individuels : c’est la conclusion d’une étude réalisée dans le Nord de l’Allemagne et qui a concerné 21 élevages laitiers bio (taille : 12 à 290 vaches) sur une période de 5 ans (2011-2016). Ont été notamment relevés les taux cellulaires dans le lait (CCS) par rapport à l’incidence des mammites subcliniques, ainsi que le taux de mammites cliniques. Les méthodes de traitement au tarissement incluaient les obturateurs (44 % des élevages), les antibiotiques (22 %) et l’homéopathie (5 %). Par rapport à des données enregistrées et publiées en Allemagne dans les élevages conventionnels, les résultats relatifs à la santé mammaire dans les élevages bio enquêtés sont équivalents voire dégradés pour certains critères tels que l’incidence des mammites cliniques (37 %), le taux de nouvelles infections durant le tarissement (34 %) et le pourcentage de mammites subcliniques des primipares (36 %). Il existe des marges très nettes d’amélioration de la santé de la mamelle dans ces élevage bio, en particulier pour ce qui concerne les conditions de logement, l’hygiène de la traite et la mise en place de solutions efficaces de traitement « alternatif ».  (Hansmann et al, Milk Science International, 2019, 72, 16-24).

VEAU LAITIER : consommation d’eau chez le veau laitier nouveau-né

Fournir de l’eau de boisson immédiatement après la naissance améliore la croissance et le développement du veau laitier en période pré- et post-sevrage : l’objectif de cette étude américaine était d’examiner la consommation d’eau et d’aliment, la croissance pondérale, le statut sanitaire et la digestibilité des nutriments sur des veaux laitiers Holstein qui disposaient d’eau de boisson, soit dès le jour de la naissance, soit à partir de 17 jours d’âge (pratique usuelle dans les élevages laitiers commerciaux américains). Pour les 2 lots de veaux, le lait était distribué « à volonté ». Les veaux, sevrés en moyenne à 49 jours, ont été suivis jusque 70 jours d’âge. Les veaux abreuvés dès la naissance ont bu en moyenne 750 grammes d’eau de boisson par jour, ceci durant les 16 premiers jours ; les veaux abreuvés à partir de 17 jours d’âge ont bu 59 % d’eau de plus sur la période pré-sevrage en comparaison du lot abreuvé dès la naissance. Les veaux abreuvés dès la naissance ont consommé en moyenne 285 grammes de lait par jour de plus que le lot « abreuvement ≥ 17 jours », avec une croissance supérieure sur la période pré-sevrage. Aucune différence, sur cette même période, n’a été observée entre les 2 lots quant à la durée et l’intensité des épisodes de diarrhée. Sur la période de post-sevrage (50-70 jours d’âge), de meilleurs résultats ont été observés pour le lot « abreuvement dès la naissance » quant au développement corporel (longueur et hauteur de l’animal) et la digestibilité de la matière sèche. Enfin, le poids vif des veaux abreuvés dès la naissance était significativement supérieur à celui des veaux à abreuvement tardif, cela sur une mesure réalisée à 5 mois d’âge. (Wickramasinghe et al, Journal of Dairy Science, 2018, 377-387).

 PARASITISME : diagnostic de la toxoplasmose chez les bovins

Le diagnostic sérologique de la toxoplasmose chez les bovins jeunes et adultes n’est pas un indicateur fiable du risque de contamination alimentaire pour le consommateur : c’est la conclusion d’une étude multicentrique évaluant la relation entre la présence d’anticorps dirigés contre Toxoplasma gondii et la détection de kystes tissulaires viables chez les bovins. Des prélèvements de sang, foie et diaphragme ont été collectés sur 167 veaux de boucherie et 235 bovins adultes provenant d’élevages situés en Italie, Roumanie, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Les sérums ont été analysés pour la détection des anticorps IgG à l’aide de 2 méthodes (agglutination MAT et immunoblot p30). Les échantillons de foie étaient analysés par essai biologique sur souris et PCR. Puis tous les diaphragmes des animaux testés positifs par les méthodes précédentes sur foie et/ou sérum ainsi qu’une sélection d’animaux testés négatifs de la même manière ont été soumis à une analyse de PCR par capture magnétique (MC-PCR). Au total, 13 bovins ont été diagnostiqués « positifs » par une des méthodes de détection directe : 7 par MC-PCR et 6 par essai biologique sur souris, indiquant la présence de parasites viables. Des bovins testés positifs par l’essai biologique ont été diagnostiqués négatifs par MC-PCR et à l’inverse également, démontrant un manque de concordance entre présence de parasites dans le foie et détection d’ADN de T. gondii dans le diaphragme. De plus, la probabilité de détecter les parasites ou leur ADN était comparable sur bovins séropositifs et séronégatifs. En conclusion, le diagnostic sérologique par MAT ou immunoblot p30 n’apporte pas d’information fiable sur la présence de parasites T. gondii chez les bovins. (Opsteegh et al, International Journal of Parasitology, 2019, 49, 7, 515-522).

ALTERNATIVES : produits de fermentation de levures et performances des vaches laitières en période de transition

La distribution d’un produit de fermentation de levures à des vaches en période de transition a amélioré le comportement alimentaire et le taux de matières grasses du lait, mais a aussi augmenté le risque de cétose subclinique et n’a pas amélioré la production laitière en début de lactation. Une équipe américaine a évalué les effets de la distribution d’un produit de fermentation de levures (Saccharomyces cerevisiae) sur le comportement alimentaire, le métabolisme, l’immunité et la production laitière de 64 vaches (50 multipares et 14 primipares) en période de transition (de 29 jours avant à 42 jours après le vêlage).  Par rapport à des vaches « témoins », il n’y a pas eu d’effet significatif du « traitement » sur l’ingéré en matière sèche, le poids et l’état corporels, les paramètres immunitaires, le niveau de production laitière, le taux de protéines et le comptage en cellules somatiques du lait. Une augmentation significative du taux de matières grasses du lait a été mesurée en semaines 4 et 5 de lactation. Le comportement alimentaire a été modifié avec une augmentation du nombre de repas et une diminution de l’intervalle entre ces repas. Le « traitement » a été associé à un accroissement de l’incidence de la cétose subclinique. (Olagaray et al, Journal of Dairy Science, 2019, 102, 8092-8107).

 SANTE : pathologies post-partum et performances des vaches laitières à long terme

 Une affection clinique diagnostiquée et traitée durant les 3 premières semaines de lactation a des effets à long terme sur les performances de production, la reproduction et la réforme des vaches laitières. Deux études rétrospectives (Canada et USA) utilisant les données de 7.500 vaches laitières ont évalué l’impact d’une pathologie au cours des 3 premières semaines de lactation (métrite, mammite, boiterie, trouble digestif ou respiratoire) sur les performances de production, la reproduction et la longévité des femelles laitières sur une lactation entière (corrigée à 305 jours). Dans la première étude (5.085 vaches), les effets défavorables d’une seule entité clinique en début de lactation ont été les suivants (base 305 jours de lactation) : baisse de 410 kg pour la production laitière, de 17 kg pour la quantité de matière grasse et de 12 kg pour la quantité de protéines ; diminution des taux de gestation avant 150 jours (82,6 vs 88,4 %), des nombres de vêlages par IA sur la lactation entière (18,5 vs 24,6 %); augmentation des pertes en gestation sur la lactation entière (23,6 vs 13,9 %) ; hausse des taux de réforme à 305 jours (36 versus 23 %). Dans la seconde étude (2.415 primipares), les pertes en production se sont élevées respectivement à 345 kg, 10% et 10% pour la production laitière, les taux de matières grasses et protéines (base lactation 305 jours). (Carvalho et al, Journal of Dairy Science, September 2019, in press).

 REPRODUCTION : prédire les chances de fécondation de vaches à métrites

L’observation de pertes vaginales (écoulements vulvaires) visibles et la détection de Trueperella pyogenes (T. pyogenes) dans les sécrétions utérines sont des facteurs décisifs pour prédire les chances de gestation des vaches laitières atteintes d’endométrites cliniques :  ce sont les conclusions d’une étude suisse ayant fait l’objet d’une thèse (Université de Zürich). L’objectif était d’améliorer la qualité de prédiction de la gestation de vaches laitières atteintes de métrite en associant des résultats d’examens de laboratoire ou/et d’observations cliniques. Sur 1.386 vaches suivies, 286 ont été retenues car présentant des signes d’endométrite (confirmée à l’aide du dispositif Metricheck : notation de 1 à 3). Un premier examen général et gynécologique des vaches était réalisé entre 22 et 45 jours de lactation avec inspection externe, palpation transrectale, vaginoscopie, échographie de l’appareil génital et analyse microbiologique du contenu utérin. Toutes les vaches étaient traitées après ce premier examen. Un second contrôle a été effectué 21 jours plus tard. Les écoulements vulvaires et l’isolement de T. pyogenes étaient significativement associés à une endométrite clinique (de score 3). Les chances de débuter une gestation dans les 200 premiers jours de lactation étaient corrélées significativement à la présence d’écoulements anormaux ou l’isolement de T. pyogenes. Les vaches avec écoulements vulvaires et/ou présence de Trueperella pyogenes dans les sécrétions utérines se caractérisaient par des taux de gestation inférieurs aux femelles sans aucun de ces 2 facteurs de risques, ceci quel que soit le stade de la lactation. (Ernstberger et al, Theriogenology, 2019, 138, 127-136).

GP-R-FR-NON-191100042