Brèves de traite – février 2020

 NUTRITION : BACA, performances et santé des vaches laitières

Il est recommandé de distribuer un régime alimentaire à balance alimentaire anion-cation (BACA) négative (régime « acidogène ») aux vaches multipares avant vêlage afin d’améliorer leurs performances en lactation ainsi que leur état de santé (baisse des risques de maladies post-partum). L’objectif de cette méta-analyse réalisée par des équipes américaine et australienne était de déterminer les effets d’une modification de la BACA (= cations – anions = (K+ + Na+) – (Cl + SO42-)) avant vêlage sur la santé et les performances des vaches laitières. Au total ont été prises en compte 42 expérimentations pour 134 traitements différents et 1.803 vaches (dont 150 primipares). Réduire la BACA sur des vaches en période pré-partum diminue leur ingéré en matière sèche avant vêlage, mais augmente leur prise alimentaire en phase de post-partum. Les vaches multipares produisent plus de lait avec plus de matières protéiques et grasses lors de régimes « ante-partum » à BACA négative, ce qui n’est pas observé sur les primipares. Les taux sanguins croissants de calcium au moment du vêlage et en période post-partum expliquent la réduction du risque de fièvre vitulaire chez les vaches multipares avec une réduction de la BACA. La diminution de la BACA est également associée à la réduction des risques de rétention placentaire et de métrite, résultant en une baisse des troubles sanitaires par vache, tant pour les primipares que pour les multipares. (Santos et al, Journal of Dairy Science, 2019, 102 : 2134-2154).

 ELEVAGE BIO : efficacité alimentaire et émission de gaz

Les élevages laitiers conventionnels semblent avoir de meilleurs rendements en termes d’efficience alimentaire (énergie et azote) et d’émission de gaz (méthane) par rapport aux élevages bio : c’est une des conclusions d’une revue bibliographique américaine qui a compilé 3 séries d’études publiées combinant modes d’élevage et races de vache laitière : ❶ élevages bio, race Jersiaise (11 études) ; ❷ élevages conventionnels, race Jersiaise (19 études) ; ❸ élevages bio, race Holstein (11 études). Les paramètres évalués étaient l’efficacité alimentaire (niveau de production laitière corrigée par l’énergie/ingéré de matière sèche), l’efficacité « azotée » (niveau d’azote du lait/ingéré azoté) et l’émission de méthane digestif (g/kg lait corrigé en énergie). Les vaches du groupe 1 (bio, Jersey) ont une moindre efficience alimentaire (-16 %) et azotée (-15,5 %) que les vaches du groupe 2 (conventionnel, Jersey), en raison notamment d’un plus fort ingéré relatif en matière sèche (+10,4 %). L’émission de méthane est également augmentée de 71 % pour les vaches du groupe 1 par rapport à celles du groupe 2. Les élevages bio ayant la plus forte dépendance ‘fourragère’ et la plus longue durée de pâturage en été étaient les moins efficients au niveau alimentaire et les plus forts émetteurs de méthane à un niveau individuel (animal) et collectif (élevage). (Brito et Silva, Journal of Dairy Science, December 2019, 103, in press).

 MAMMITES : mammites subcliniques à SCN, comptage cellulaire et production laitière chez les vaches primipares

Les espèces de Staphylocoques « non aureus » (SCN) impliquées dans les mammites subcliniques des vaches laitières primipares n’ont pas toutes le même impact sur les niveaux de cellules somatiques du lait : cette étude longitudinale réalisée par l’Université de Gand (Belgique) visait à évaluer l’impact de mammites subcliniques dues à des Staphylocoques « à  coagulase négative » (SCN) dans les 18 premiers jours de lactation sur le comptage en cellules somatiques du lait (CCS) et le niveau de production laitière de vaches primipares Holstein. Au total, 82 animaux ont été suivis de 1 à 130 jours de lactation avec prélèvements de lait de quartier tous les 14 jours. Une culture bactériologique a été réalisée sur les prélèvements des périodes 1 à 14 jours puis 15 à 18 jours de lactation. Staphylococcus chromogenes a été l’espèce la plus fréquemment isolée, que ce soit au cours de la première ou de la seconde période de prélèvements (respectivement 29 et 53 % des isolats de SCN). Dans les quartiers infectés par Staphylococcus chromogenes dès la première bactériologie positive, il a été noté un comptage en cellules somatiques du lait significativement plus élevé que dans les quartiers non infectés dans la suite de la lactation (au-delà de 18 jours) ; cet effet défavorable n’est pas confirmé pour les autres espèces de SCN. Par contre, quelle que soit l’espèce bactérienne (SCN), le statut infecté de la mamelle dans les 18 premiers jours de lactation n’entraine pas une baisse du niveau de production laitière cumulée des 4 mois post-vêlage. (Valckenier et al, Journal of Dairy Science, October 2019, 103, in press).

 VEAU LAITIER : facteurs de risque de la mortalité périnatale

Au niveau individuel, les facteurs de risque de mortalité périnatale (0-48 heures) des veaux laitiers les plus couramment reportés sont la saison ou le mois de naissance, le sexe, l’assistance au vêlage, la parité et la gémellité : des auteurs néo-zélandais ont réalisé une large revue de la littérature (sur les 20 dernières années) concernant la mortalité périnatale des veaux laitiers. Celle-ci était comprise selon les études entre 2,4 et 9,7 %. Il existe des paramètres retrouvés constamment (et indépendamment du pays, de la région ou du type d’élevage) comme facteurs de risques de cette mortalité : l’assistance au vêlage (risque plus élevé en cas d’intervention), la parité (veaux issus de vaches primipares) et la gémellité (risque plus élevé si jumeaux). Pour la saison, le risque dépend des pays ou continents : la mortalité est plutôt plus élevée en hiver dans les pays européens. Les veaux mâles seraient plus sujets à la mortalité périnatale, même si presque la moitié des études ne sont pas concluantes sur ce point. Enfin, il est difficile de mettre en évidence l’influence d’autres facteurs individuels (exemple : poids à la naissance) ou inhérents à l’élevage (exemples : taille de la ferme, management, reproduction, …), souvent à cause du faible nombre d’études publiées.  (Cuttance and Laven, The Veterinary Journal, 2019, 253 : 105394).

 SANTE : épidémiologie de l’infection à Herpesvirus bovin de type 4 en élevage laitier

La transmission horizontale joue un rôle déterminant dans la transmission de l’Herpesvirus bovin de type 4 (BoHV-4), et la contamination des lots de femelles est suffisante pour induire une forte population séropositive :  ce sont les principaux enseignements d’une étude épidémiologique espagnole conduite dans un élevage laitier présentant des épisodes récurrents de métrite à BoHV-4. Les sérologies ont été effectuées au départ sur tous les animaux de plus de 6 mois dans le troupeau ; ensuite ont été prélevées uniquement les génisses, mensuellement durant les 4 mois suivant leur introduction dans le troupeau, puis 6 à 10 mois après leur entrée dans l’élevage. Par ailleurs, des prélèvements pour analyse PCR ont été réalisés sur des femelles réparties en 4 groupes (primipares ou multipares, avec ou sans métrite), à partir de sécrétions : vaginales au moment du vêlage ; vaginales, nasales et lactées toutes les semaines dans le premier mois de lactation. La séropositivité augmentait avec la parité. Quelques primipares positives en PCR au vêlage n’avaient pas encore séroconverti dans le mois suivant la mise bas (animaux excréteurs séronégatifs) ; la plupart des génisses (80 %) étaient devenues séropositives 6 à 10 mois après leur introduction dans le troupeau. Pour les multipares infectées, l’excrétion a été prédominante via les sécrétions vaginales (chez 93 % des femelles infectées), moins importante dans les exsudats nasaux (50 %) et dans le lait (50 %). Pour les autres groupes (primipares avec ou sans métrite), l’excrétion virale n’a pu être mise en évidence que sur les sécrétions vaginales et seulement dans la semaine suivant le vêlage. (Diaz et al, Veterinary Microbiology, December 2019, 239 : 108495).

 TRAITE : facteurs de variation du CCS de vaches saines en robot de traite

Les variations physiologiques sont probablement responsables d’une large part de la variabilité totale du comptage en cellules somatiques (CCS) des vaches laitières saines (sans mammite clinique) traites à l’aide d’un robot : une équipe universitaire norvégienne a analysé les données de 129 vaches (pour 173 lactations) d’un élevage expérimental, équipé d’un robot de traite (De Laval) et d’un compteur cellulaire en ligne (On-Line Cell Counter, De Laval). Les données de 62.400 traites individuelles ont été collectées sur une période de 16 mois ; les vaches sélectionnées étaient indemnes de mammite clinique (statut validé par une bactériologie sur lait de quartiers). Les facteurs suivants (à l’échelle individuelle) n’expliquaient que 15 % de la variabilité du critère CCS : stade de lactation, parité, niveau de production laitière, cellules somatiques résiduelles de la précédente traite, différence de conductivité entre les quartiers, saison, statut infectieux et lignée génétique. Une proportion importante des variations du CCS reste inexpliquée, malgré un enregistrement précis et continu du statut infectieux intramammaire des vaches. Les variations du CCS sont vraisemblablement dues à des fluctuations physiologiques, ce qui est à considérer dans le cadre de la conduite sanitaire d’un troupeau laitier. (Norstebo et al, Preventive Veterinary Medicine, 2019, 172, 104786).

 IMMUNITE : qualité du colostrum de la vache laitière à l’échelle du quartier 

Le niveau de production laitière et les concentrations en IgG des différents quartiers de la mamelle ne varient pas seulement au moment du premier colostrum, mais également durant les traites suivantes. Les auteurs avaient pour objectif d’étudier les niveaux de production laitière et d’IgG, ainsi que leur distribution entre les différents quartiers de la mamelle, ceci au cours des premières traites suivant le vêlage. Un suivi a été réalisé sur 29 vaches laitières Holstein multipares d’un élevage suisse : une première traite était effectuée 30 à 180 minutes suivant le part, puis 2 fois par jour (pour un total de 5 traites après vêlage). Production laitière et concentration en IgG étaient mesurées par vache et par quartier pour l’ensemble des traites. La répartition de la quantité de lait et d’immunoglobulines G n’a pas été complétement répétable pour les 5 traites successives : le « classement » des quartiers sur ces critères a en effet changé au cours du temps. La production du premier colostrum n’était pas liée à des facteurs inhérents à la vache ou au veau (intervalle vêlage-1ère traite, parité, production laitière précédente, durées de gestation et de tarissement, sexe et poids de naissance du veau). La production laitière était supérieure, à la fin de l’étude, sur les quartiers arrière. La concentration en IgG par quartier était plus élevée chez les vaches à plus forte production laitière lors de la précédente lactation, plus faible chez les vaches à gestation plus longue ou ayant des veaux plus lourds à la naissance. La décroissance des taux d’IgG a été indépendante de l’augmentation concomitante de la production de lait, avec des variations de niveau par quartier. Ces résultats confirment l’indépendance des différents quartiers de la mamelle au moment du démarrage de lactation, ceci malgré une même exposition aux stimuli hormonaux.  (Kessler et al, Journal of Dairy Science, October 2019, 103, in press).

BREBIS LAITIERE : association entre charge parasitaire intestinale et mammite subclinique chez la brebis laitière

La prévalence de mammites subcliniques est significativement supérieure chez les brebis laitières infestées par des nématodes gastro-intestinaux en comparaison à des brebis non parasitées : c’est la conclusion d’une étude réalisée en Grèce sur près de 3.500 brebis laitières réparties dans 16 élevages. Les prévalences estimées, sur la base d’analyses cliniques, bactériologiques et coprologiques, ont été de 23 % pour les mammites subcliniques (avec 2/3 des cas dus à des Staphylocoques « à coagulase négative ») et de 63 % pour les infestations à nématodes gastro-intestinaux (avec prédominance de Teladorsagia spp. et Haemonchus spp. : respectivement 53% et 38 % des isolements). La prévalence des mammites subcliniques a été significativement supérieure chez les brebis infestées (26 %) par rapport aux brebis non parasitées (16 %). Il en a été de même en fonction du niveau d’infestation (en opg = œufs par gramme de fèces) : prévalence de 31 % pour les brebis à forte charge parasitaire versus 19 % pour les animaux à faible charge parasitaire (seuil = 357,7 opg). Le niveau moyen d’infestation était également significativement plus élevé chez les brebis ayant une mammite subclinique en comparaison des brebis saines : 500 versus 316 opg. (Kordalis et al, Veterinary Parasitology, 2019, 265 : 56-62).

  LOCOMOTION : étiologie du phlegmon interdigité en élevage laitier

Les principales bactéries isolées lors de phlegmon interdigité (ou panaris) de la vache laitière sont Fusobacterium necrophorum dans tous les stades lésionnels de l’infection, Trueperella pyogenes dans les stades tardifs (vers la guérison), avec un rôle croissant de Dichelobacter nodosus dans les formes les plus sévères. Des scientifiques de la Faculté Vétérinaire d’Helsinki (Finlande) ont suivi 19 troupeaux de vaches laitières en stabulation libre concernés régulièrement par des épisodes de panaris, ainsi que 3 élevages « témoins » non atteints (moyenne de tous les élevages : 75 vaches laitières et 9.234 kg de lait). Les élevages à problèmes récurrents de panaris étaient divisés en 2 groupes selon le taux de morbidité dans les 2 mois suivant l’apparition des signes cliniques (9-33 % et plus de 50 %).  Des prélèvements pour bactériologie ont été réalisés sur 106 vaches souffrant de panaris, 58 vaches atteintes d’autres troubles locomoteurs et 64 vaches saines. Fusobacterium necrophorum sous-espèce necrophorum était significativement associé aux lésions de panaris à tous les stades lésionnels (aigu et en cours de cicatrisation). Six autres bactéries ont été également isolées sur les vaches atteintes de panaris : Dichelobacter nodosusPorphyromonas levii, Prevotella melaninogenica, Treponema spp. et Trueperella pyogenes. Cette dernière bactérie était plutôt associée au second stade de l’infection (évolution vers la guérison des lésions). Dans la majorité des prélèvements issus de lésions aiguës (66.7%) ont été mis en évidence conjointement F. necrophorum et D. nodosus. Enfin, les auteurs ont trouvé des différences en termes de bactériologie selon le taux de morbidité dans l’élevage (modéré ou élevé) : D. nodosus était plus communément isolé sur les lésions de vaches issues de troupeaux à forte morbidité. (Kontturi et al, BMC Veterinary Research, 2019, 15 : 44).

 TRAITEMENT : réduction des traitements antibiotiques au tarissement et santé mammaire dans les élevages néerlandais

La transition recommandée aux Pays-Bas d’un traitement systématique vers un traitement sélectif au tarissement a résulté en une réduction des prescriptions d’antibiotiques en élevage laitier sans entrainer d’effets défavorables sur la santé de la mamelle en période sèche. Les auteurs néerlandais avaient pour objectif d’évaluer la dynamique des comptages cellulaires du lait dans le cadre d’une transition encouragée au niveau national d’un traitement systématique vers un traitement sélectif au tarissement. Outre l’analyse d’une base nationale (3.500 élevages), les auteurs ont extrait, à partir de données de cabinets vétérinaires (280 élevages), 20 troupeaux laitiers dont ils ont analysé les données de performances (production laitière) et de santé (taux de nouvelles infections de la mamelle, taux de traitement et taux de guérison de ces infections entre autres), soit 2.638 vaches entre 2013 et 2015. De manière globale, ont été observées dans ces 20 élevages sur la période considérée de 2 ans : ❶une diminution des prescriptions d’antibiotiques en général de 29 %, d’antibiotiques au tarissement de 35 % et d’antibiotiques en lactation de 29 % ; ❷une stabilisation du taux de nouvelles infections mammaires durant le tarissement (12 à 14 %) et du pourcentage de guérison des infections mammaires au tarissement (83 à 80 %). Au niveau individuel (vache), un faible comptage cellulaire mesuré au premier prélèvement de lait le vêlage était significativement associé à : ❶l’application d’un antibiotique au tarissement associé ou non à un obturateur ; ❷l’utilisation d’un obturateur seul au tarissement ; ❸un faible niveau de cellules mesuré au dernier prélèvement de lait avant tarissement. (Vanhoudt et al, Journal of Dairy Science, 2018, 101, 3248-3260).

GP-R-FR-NON-200200003