Mise au point d’un outil d’évaluation et d’amélioration du bien-être des veaux et des génisses

L’objectif de cette étude menée au Canada était d’élaborer et d’évaluer la pertinence d’une méthode/outil d’évaluation et d’amélioration du bien-être des veaux et des génisses laitières au Canada.

Dans ce but, les auteurs ont tout d’abord mis au point l’outil sur la base de la méthode HACCP. L’outil s’est ainsi construit sur l’analyse de 10 secteurs clés jugés critiques: vêlage, soins au nouveau-né, procédures douloureuses (ex : ébourgeonnage), gestion du colostrum, séparation mère-veau, alimentation du veau, sevrage, logement du veau, alimentation des génisses, logement des génisses et monitoring en général. Pour chaque secteur, des critères et indicateurs ont été définis à partir de données bibliographiques. De même pour les objectifs à atteindre pour chaque indicateur.

L’outil, notamment les indicateurs et objectifs, a ensuite été soumis à validation/discussion par des experts. Le principe retenu a été au final d’accorder autant de poids à chacun des 10 secteurs, considérés comme aussi importants les uns que les autres. Au sein de chaque secteur, il en allait de même pour chaque critère auquel a été affecté un même coefficient.

L’objectif était de pouvoir mener la visite en 3 heures (interview sur les pratiques : 30 minutes, tour des bâtiments: 15 minutes, évaluation des conditions dans le bâtiment: 1h, notation: 5 minutes, vérification de la gestion du colostrum: 15 minutes, débriefing avec l’éleveur: 30 minutes). La plupart des indicateurs s’appuyait essentiellement sur des observations et réponses des éleveurs aux questions mais aussi sur quelques mesures effectuées sur des animaux comme la qualité du colostrum et la détermination de teneurs sériques en IgG (mesures effectuées par les éleveurs eux-mêmes).

L’outil est disponible à l’adresse suivante : www.agrireseau.qc.ca/bovinslaitiers

Les auteurs ont ensuite évalué l’outil dans 28 fermes québécoises. Ils ont évalué la faisabilité de la démarche, la reproductibilité des indicateurs, l’acceptabilité des objectifs fixés par les éleveurs. Enfin, 6 mois après la visite, l’observance des recommandations a été évaluée.

Il en ressort les résultats principaux suivants :

  • En moyenne, les visites duraient entre 3 et 4 heures (objectif de 3 heures): la partie débriefing était plus longue que prévue ainsi que la partie vérification des prélèvements/analyse de colostrum.
  • La reproductibilité des indicateurs mesurés sur l’environnement et les pratiques était globalement bonne. Seul bémol, sur l’évaluation de la quantité de fumier et de litière dans le logement des génisses. Des grilles visuelles ont été développées pour harmoniser la notation.
  • Les objectifs fixés semblaient réalistes, à la fois permettant d’identifier les zones à problèmes sans être inatteignables.
  • La totalité des éleveurs considéraient l’outil utile pour évaluer et améliorer le bien-être de leurs animaux. 68% d’entre eux estimaient utile d’utiliser cet outil comme méthode d’accréditation. Les éleveurs moins enclins à une telle utilisation mettaient en avant la quantité de travail nécessaire pour enregistrer au quotidien nombre d’indicateurs.
  • La  réalisation du prélèvement  du sang par l’éleveur sur les veaux pour doser les IgG a été jugée trop contraignante et difficile par près d’un éleveur sur 2. En revanche, se concentrer sur les  bonnes pratiques de distribution du colostrum était un point approuvé par tous les éleveurs.
  • 6 mois après la visite, parmi les mesures ayant été modifiées de façon favorable le plus profondément on retrouve: l’identification rapide des veaux et la désinfection du nombril (respectivement réalisés par 57 et 79% des éleveurs après contre seulement 14 et 43% avant la visite), et les pratiques colostrales (première buvée de 4L par 39% vs 4% avant; usage d’un colostromètre (29% vs 4% avant). Les autres pratiques (alimentation, logement, mutilations) ont également progressé également mais de façon plus marginale.
  • La tenue d’un « passeport médical du veau » était plutôt bien acceptée par les éleveurs.

En conclusion

Il ressort, dans les conditions de cette étude, que l’outil mis au point semble faisable et accepté des éleveurs et amène des changements positifs de pratiques, notamment sur la gestion des premières heures de vie du veau. La conduite d’une évaluation dans un temps restreint, avec des objectifs construits sur des bases scientifiques, ambitieux mais partagés par les éleveurs, est un facteur clé de réussite. Les limites de cet outil sont le peu de mesures objectives sur les animaux eux-mêmes et la difficulté annoncée de certains éleveurs à collecter les informations en routine.

Référence: Résumé Article “An advisory tool to improve management practices affecting calf and heifer welfare on dairy farms.” Vasseur E., Rushen J., de Passillé A.M., Lefebvre D., Pellerin D. Journal of Dairy Science, 2010, (93) :4414-4426.