Nature du colostrum et conséquences sur le développement intestinal du veau laitier

Le colostrum bovin renferme, outre de grandes quantités d’anticorps (surtout IgG1), des cytokines et des cellules, qui sont de plusieurs natures (dans l’ordre de fréquence) : leucocytes (monocytes/macrophages), cellules épithéliales, lymphocytes et neutrophiles.

Ces cellules sont capables de franchir la barrière épithéliale digestive, gagner la circulation sanguine et lymphatique, puis coloniser des organes lymphoïdes, comme les plaques de Peyer de l’intestin ou les nœuds lymphatiques mésentériques, ceci dès 24 heures suivant l’ingestion de colostrum.

Dans la littérature, le rôle du colostrum sur la santé et l’immunité du veau s’est très souvent focalisée sur les effets du transfert passif des anticorps colostraux. Le rôle des cellules maternelles d’origine colostrale sur la réponse immunitaire et le développement intestinal du veau n’a été que peu étudié dans la bibliographie.

L’objectif de cette étude conduite par une équipe scientifique brésilienne, en partenariat avec l’Université de Géorgie (USA), était d’évaluer la capacité des cellules maternelles colostrales à moduler la colonisation microbienne intestinale, la réponse inflammatoire active et leur influence sur la survenue de diarrhées chez le veau laitier.

Vingt veaux ont été répartis en deux groupes : COL+ (n = 10) recevant un colostrum frais entier provenant de leurs mères respectives, avec des cellules maternelles viables ; COL- (n = 10) recevant du colostrum congelé « poolé », ne contenant aucune cellule maternelle viable. Toutes les mesures ont été effectuées avant l’ingestion de colostrum (J0), le lendemain de l’ingestion (J2) et hebdomadairement, soit les 7ème (J7), 14ème (J14), 21ème (J21) et 28ème (J28) jours.

L’intensité de la diarrhée a été évaluée à l’aide d’un score fécal, et le statut inflammatoire systémique a été évalué en utilisant une combinaison de plusieurs critères : température, anémie, taux de fer sérique total, concentration totale d’haptoglobine sérique et besoin d’un traitement antimicrobien par voie systémique. Le nombre de bactéries indicatrices présentes dans la population fécale a été estimé à l’aide d’un test qPCR (réaction de polymérisation en chaine quantitative en temps réel).

Les principaux résultats sont les suivants

  • Les veaux COL- ont présenté des signes plus fréquents de réponse inflammatoire systémique, comparativement aux veaux COL+, comme de la fièvre à J7, des niveaux d’haptoglobine plus élevés à J7 et J14 et des niveaux inférieurs de fer sérique à J7 et J14.
  • L’anémie a été détectée plus souvent chez les veaux COL- à J21.
  • Les veaux COL- avaient 1,66 fois plus de risque d’avoir un taux d’haptoglobine sérique élevé et 1,8 fois plus de risque d’avoir besoin d’un traitement avec des antimicrobiens, toujours en comparaison des veaux COL+.
  • Un nombre inférieur de copies d’ADN de Clostridium perfringens a été détecté chez les veaux COL+ à J2 et J7. De même, un plus faible nombre de copies d’ADN a été observé pour Escherichia coli et Lactobacillus spp. dans les échantillons fécaux de veaux COL+ à J7.

En conclusion, cette étude montre qu’alimenter les veaux nouveau-nés avec du colostrum frais contenant des cellules maternelles viables est un facteur important d’une colonisation appropriée de l’intestin des veaux avec des populations bactériennes.

A l’inverse, distribuer au veau du colostrum congelé « poolé » sans cellules maternelles viables augmente les risques de réactions inflammatoires, avec expression de signes cliniques comme la fièvre et la diarrhée.

Résumé Publication “Influence of feeding fresh colostrum from the dam or frozen colostrum from a pool on indicator gut microbes and the inflammatory response in neonatal calves.” Cecilia Martin C, Marquart Fontes Novo de Oliveira S, França dos Reis Costa J, Costa Baccili C, Toledo Silva B, Hurley DJ, Gomes V. Research in Veterinary Science, 2021, 104 : https://doi.org/10.3168/jds.2020-19476.